Elections au FarWest

La salle de la mairie, à l’étage, sombre, avec les tables en bois massif et les chaises orange des années 70. Une douzaine de personnes, dont une seule femme, la secrétaire de mairie que je n’avais jamais vue aussi silencieuse ; des hommes de 20 à 90 ans, le plus jeune appuyé timidement contre une table, à l’écart, le plus âgé assis contre un mur avec son chapeau et sa canne. La plus grande partie agriculteurs, de la vieille garde, maïs-tournesol-tabac, aux nouvelles formules, blé et lentilles bio, en passant par la vigne et les petits malins (foies gras-conserves-melons), les autres artisans, sauf le maire, commercial à la retraite, en costume à rayures, chaussures pointues et moustache gasconne. Tous graves, tous silencieux, sauf ceux qui comptent. Ça tombe juste, heureusement. Soulagement léger. Le malin des melons sourit gentiment en faisant la plaisanterie rituelle. Une discussion casuistique est étouffée dans l’œuf : la plupart de ceux qui sont ici connaissent par cœur la réglementation entière (j’ai entendu dire l’autre jour que les gens des villages connaissaient sûrement mal la loi ; rien n’est plus faux). La secrétaire de mairie sort discrètement pour photocopier les résultats, et l’agriculteurs de la vieille garde me montre le papier sur lequel il a vérifié les comptes en décryptant pour moi les initiales. On distribue les photocopies, fin du rituel, on serre des mains, et je file dans la rue pour cacher ma joie.

Village de L en Quercy : 82 votants, 21 voix pour Europe Ecologie, (c’est-à-dire trois de moins que pour la liste du gouvernement). Si les agriculteurs, je me dis, commencent à voter pour les écologistes, alors, peut-être, peut-être…