Noël sur le carreau
Noël. Je ne
sais pas quoi penser. Il y a des blagues sur Facebook, sur les
parents qui te gavent comme une oie, la grande lassitude des fêtes
de famille. Je suis content d'y couper. J'ai toujours voulu y couper.
De toute façon, je n'ai même pas faim.
Pour Noël,
j'ai téléphoné à mon frère. Il savait pas où j'habitais. J'ai
parlé à ma mère sur msn. Elle avait pas le temps, c'était l'heure
de son feuilleton. Elle m'a refilé à mon père, mais il m'a
expédié en une phrase, je suppose qu'une meuf quelque part essayait
d'entrer en communication avec lui. Je lui ai demandé s'il avait
reçu mon cadeau, mais il a pas eu le temps de me répondre. Il avait
eu le temps, cinq minutes plus tôt, de m'envoyer des photos exaltées
de mon frère et son jeune fils au pied du sapin.
Quand j'y
allais, à Noël, quand j'étais plus jeune, il y avait toujours ce
moment, après, où les copains revenaient soulagés de leurs propres
hostilités familiales, ils disaient “ça s'est bien passé,
finalement, c'était pas si mal”, et moi, j'étais comme par terre,
de la violence du truc, il me fallait des jours pour m'en remettre.
Comme dans ces films où les parents sont méchants, mais finalement,
après, tout le monde se réconcilie et je reste sur le carreau.