Leaving Lasc. IV – Western (But I'll be back)
“Chicago”,
fait le gros maire à moustache en secouant la tête (maintenant que
je j'y repense, il porte le costume à rayures d'Al Capone).
“Chicago. Ça va vous changer, ça”, il annonce d'un air entendu. C'est un samedi matin d'été
bleu, dans la petite salle de la mairie de Lasc. en Quercy, et nous sommes venus rendre
nos clefs avec le coeur lourd des émigrants qui ont échoué. Ça va
nous changer, oui, les Etats-Unis, n'en doutons pas,
mais curieusement je m'obstine à penser qu'être un étudiant en
thèse dans un ville de campus demandera moins de trésors
d'imagination, d'adaptation et de courage que d'être un intello précaire queer
dans un village du Quercy. Le FarWest n'est pas forcément là
où on pense. (En réalité, les seules descriptions cohérentes des gens et des ambiances d'ici, je les ai trouvées dans des romans ou des films américains ; les Français ne savent parler que des villes.)
Sous les cris
des hirondelles, nous remontons la rue pour faire l'état des lieux,
le gros maire à moustache aussi raide que s'il avait passé sa vie à
cheval. Monsieur C détourne le regard derrière sa grille (le gros
maire à moustache appartient à un clan qui n'adresse pas la parole
à Monsieur C, pour des questions remontant à la Guerre de 40,
époque à laquelle le gros maire n'était pas né et Monsieur C
n'avait encore jamais mis les pieds dans le Quercy, toutes histoires
qui mériteraient d'être racontées, et qui le fera ?).
L'état des
lieux expédié, les papiers signés, le gros maire nous serre la main
pour nous souhaiter bonne chance dans les grandes plaines. Mais je n'ai pas dit mon dernier
mot, cowboy. Je reviendrai.